Le Trésor des Trésors

Le 25 août 2025, 360 servants d’autels, garçons et filles, âgés de 12 à 20 ans, venus de 18 diocèses de France, ont partagé un intense moment de joie avec le Pape Léon XIV, au cours d’une audience privée dans la salle Clémentine, dans les palais du Vatican. Au cours de cette rencontre, le Saint Père leur a redonné le cœur de l’espérance chrétienne : « Dieu, le créateur du ciel et de la terre, a voulu souffrir et mourir pour les créatures que nous sommes. Dieu nous a aimés à en mourir ! ». Le pape a rappelé à ces jeunes, et à nous-mêmes, que ce mystère de la mort et de la résurrection de Jésus est le Trésor de l’Eglise. C’est la mémoire de cet évènement que nous célébrons chaque dimanche au cours de la messe. Le pape poursuit ainsi en nous dévoilant que cette mémoire de la Passion de Jésus, l’Eglise « la garde et la transmet en célébrant l’Eucharistie que vous avez la joie et l’honneur de servir. L’Eucharistie est le Trésor de l’Église, le Trésor des Trésors. Dès le premier jour de son existence, et ensuite pendant des siècles, l’Église a célébré la Messe, de dimanche en dimanche, pour se souvenir de ce que son Seigneur a fait pour elle. »

On comprend alors l’importance du rôle des servants au cours de la liturgie qui ont la grande chance d’approcher de très près un mystère aussi grand. Et on comprend surtout l’importance pour l’Eglise de ceux à qui le Seigneur Jésus a confié de célébrer l’Eucharistie : les prêtres. C’est pourquoi de manière logique le pape Léon XIV va ensuite parler à ces jeunes de la vocation sacerdotale : « Je m’adresse à vos consciences de jeunes, enthousiastes et généreux, et je vais vous dire une chose que vous devez entendre, même si elle doit vous inquiéter un peu : le manque de prêtres en France, dans le monde, est un grand malheur ! Un malheur pour l’Église. » Et je ne peux que suivre le triste constat du Pape : quel malheur pour le diocèse de Versailles de ne pas avoir eu d’ordination sacerdotale en 2025, quel grand malheur pour la paroisse de Marly de ne pas avoir eu de vocation sacerdotale diocésaine depuis plus de 60 ans !

La question de la promotion de la vocation sacerdotale diocésaine est un grand sujet de préoccupation pour moi. Au cours de ma vie de laïc et de prêtre, je me suis forgé la conviction que réserver le service de l’autel aux garçons est un moyen privilégié pour une pastorale de la vocation sacerdotale. La présence chaque dimanche des garçons autour de l’autel est un signe éloquent, il rappelle à la communauté des chrétiens que la prière pour les vocations sacerdotales doit être une réalité quotidienne, un sujet de préoccupation permanent. D’ailleurs, dans une lettre aux conférences épiscopales, le Saint-Siège rappelait : « qu’il sera toujours opportun de suivre la noble tradition du service de l’autel confié à de jeunes garçons. On sait que ce service a permis un développement encourageant des vocations sacerdotales. L’obligation de continuer à favoriser l’existence de ces groupes d’enfants de chœur demeurera donc toujours. » (Revue Notitiae 15 mars 1994).

Je n’ai pas été servant d’autel, mais, dans mon collège, seuls les garçons étaient servants d’autel ; et cette originalité, que je ne retrouvais pas dans ma paroisse, m’a fait ressentir que la célébration de la messe n’était pas une célébration comme les autres. Dans mon cœur d’enfant, au cours de ces messes, je ressentais que Dieu apparaissait dans le chœur de la chapelle de mon collège. C’est parce qu’autour de l’autel tout était différent de mon univers habituel, que je percevais intérieurement que ce que je voyais était une manifestation du ciel invisible et non pas une représentation de la terre matérielle.

Plus tard, j’ai été responsable de servants d’autel, pendant mon séminaire en Belgique, dans la paroisse de Basse-Wavre, et j’ai constaté que les filles et les garçons ne fonctionnent pas de la même façon et que cela avait un impact sur la dynamique du groupe. Enfin, dans ma précédente paroisse, où le service de l’autel est réservé aux garçons depuis plusieurs années, il y a eu deux vocations sacerdotales diocésaines venues du groupe des servants. Tous ces éléments font que j’aimerais que le groupe des servants d’autel soit entièrement composé de garçons.

Mais j’aimerais également trouver une place dans la liturgie pour les filles, car elles sont membres à part entière de l’Église, et qu’il faut que ceci se voie de manière visible. J’ai découvert dans le groupement de Marly que beaucoup de jeunes filles ont bénéficié de leur participation à l’équipe des servants pour se motiver à participer activement à la messe, poser les premiers jalons de leur vie de baptisée et construire leur vie foi. Et j’attache beaucoup d’importance à ce que le groupement paroissial puisse aider les jeunes à grandir et trouver leur place dans l’Eglise, et plus particulièrement les femmes.

Les deux positions sont contradictoires, c’est donc le signe que l’Esprit Saint est à l’œuvre ! Quand la situation est bloquée c’est toujours le signe d’un appel de Dieu à une croissance nouvelle !

C’est pourquoi, j’ai décidé de confier la question de la résolution de cette contradiction à l’équipe pilote des servants : le père Placide, Edouard et Anne-Sophie Vinet. Je leur confie, cette année, la mission de réfléchir pour l’équipe des servants et des servantes de la paroisse de Saint-Vigor et Saint-Thibaut à inventer une manière de tenir les deux ensemble (les paroisses Sainte-Anne et Saint-Louis ne sont pas concernées). Dans un premier temps, ils réfléchiront entre eux ; puis, dans un deuxième temps, avec les grands jeunes appelés par le père Placide ; et enfin, dans un troisième temps, avec les grands servants. Il leur faudra donc discerner des solutions qui permettent de distinguer les garçons et les filles dans leur présentation et dans leur rôle, tout en laissant une place pour chacun. Tout est à inventer, mais rien n’est impossible pour qui met sa confiance en Dieu.

Père Gaël Bénéat+