Dans l’Évangile de ce Dimanche, Jésus-Christ apporte un concept clé pour la compréhension de l’organisation de l’Église : il présente celle-ci comme une réalité organique en prenant l’exemple du Corps. Dans l’Ancien Testament pour parler de l’assemblée des croyants on fait référence au Peuple de Dieu. C’est un concept fréquent dans la spiritualité vétérotestamentaire, il définit à la fois le peuple qui a le Seigneur pour Dieu et le peuple qui appartient à Dieu. Mais il y a le risque que cette conception entraîne une perspective politique de la compréhension du peuple de Dieu. L’Église ne peut pas se comparer aux régimes politiques ; elle prend le risque de se réduire à une pieuse ONG. Comme le rappelait le Pape François lors de sa première homélie comme pape avec les cardinaux, si l’Église ne se rattache pas au Christ elle perd son identité « Quand on ne confesse pas Jésus Christ, on confesse la mondanité du diable, la mondanité du démon. » (Pape François 14 mars 2013).
Le concept de corps, qui sera repris ensuite par Paul dans ses lettres, permet de penser l’unité de l’Église et la diversité de ces membres. Dans la première lettre aux Corinthiens au chapitre 12, Paul fait discuter les membres du corps pour nous faire comprendre que si nous partageons la même dignité dans le corps, nous ne sommes pas pour autant interchangeables. Chaque membre de l’Église possède un rôle, une fonction, une vocation propre, qui a été voulue par Dieu et que nous devons habiter pour le bien du corps tout entier. Il serait périlleux pour le corps que tous aient la même fonction : « Si, dans le corps, il n’y avait que les yeux, comment pourrait-on entendre ? S’il n’y avait que les oreilles, comment pourrait-on sentir les odeurs ? Mais, dans le corps, Dieu a disposé les différents membres comme il l’a voulu. » (1 Corinthiens 12, 17-18).
Paul va appliquer cette compréhension en conseillant à ceux qui sont devenus chrétiens de ne pas chercher à changer de statut social : « Chacun doit continuer à vivre dans la situation que le Seigneur lui a donnée en partage, et où il était quand Dieu l’a appelé. C’est la règle que j’établis dans toutes les Églises. » (1 Corinthiens 7, 17). Il est bien plus profitable pour le corps de persévérer dans sa vocation propre plutôt que de convoiter d’autre vocation, qui nous paraîtrait plus brillante ou plus honorable. Cette façon de penser l’unité des membres est profondément révolutionnaire ; elle nous sort des schémas mondains où l’unité se fait dans des rapports de forces et dans la violence, et nous introduit à une manière de vivre où nous sommes au service des vocations des autres membres du corps.
Père Gaël Bénéat+
