Le premier dimanche de l’Avent, une nouvelle traduction en langue française du missel romain entrera en vigueur. Pour découvrir les modifications apportées qui viendront bousculer un peu nos habitudes, 5 fiches ont été préparées par l’équipe liturgique de notre paroisse :
Fiche n°5 : la participation active
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Le souci d’une « participation pleine, consciente et active » des fidèles aux célébrations liturgiques a été exprimé par le concile dans la Constitution sur la Sainte Liturgie. Certains éléments de la nouvelle traduction du Missel nous permettent de mieux saisir la nature de cette participation active des fidèles.
- L’enrichissement des formules
La première traduction avait, dans un souci de clarté et de simplicité, omis certains mots. Par fidélité au texte latin d’origine, ces mots sont désormais rajoutés.
En premier lieu, le mot Seigneur (Dominus), revient régulièrement ponctuer les prières et nous tourne sans cesse vers celui que nous célébrons.
Des adjectifs font aussi leur apparition : Bienheureuse Vierge Marie – de ton serviteur Abel le Juste – par les mains de ton saint Ange – le Corps et le Sang très saints de ton Fils – des saints Apôtres … Ils insistent sur la sainteté de Dieu et de ses serviteurs, sainteté à laquelle nous sommes nous aussi appelés.
Dans un autre registre, des mots viennent préciser la grandeur de l’amour de Dieu et de sa miséricorde : en accordant largement ton pardon – souviens-toi dans ta miséricorde, de tous les défunts – écoute, en ta bonté – que, par ta bonté, elle soutienne mon esprit et mon corps…
L’enrichissement des formules favorise l’ouverture du cœur des fidèles à la louange et à la contemplation, suscitant une prière plus fervente.
- Les attitudes
En complément des prières prononcées à haute voix, le missel comporte également quelques prières dites à voix basse par le prêtre seul et un certain nombre d’indications sur la manière de célébrer et les attitudes à avoir par le prêtre et/ou l’assemblée à différents moments de la célébration. Ces indications étant écrites en rouge (ruber en latin), on les appelle les rubriques. Elles sont autant d’invitations à associer notre corps à notre cœur dans l’action liturgique.
Après la prière du Gloire à Dieu, un temps de silence est rajouté pour se préparer à entendre la prière d’ouverture.
Au moment de proclamer l’Évangile le prêtre prie Dieu à voix basse de lui donne d’annoncer « dignement [son] saint Évangile. »
Lors de la profession de foi (Symbole de Nicée-Constantinople et symbole des Apôtres) nous sommes invités à nous incliner au moment de l’évocation de l’incarnation du Fils en Marie.
Au moment de la consécration, les gestes du prêtre sont précisés. Après la consécration du Corps puis du Sang du Christ, il est demandé non plus seulement de « faire la génuflexion » mais « d’[adorer] en faisant la génuflexion ».
On le voit, l’ensemble des indications vont dans le sens de la manifestation d’une plus grande sacralité de l’action liturgique et d’une plus grande intériorité des fidèles.
On comprend donc que la participation active que souhaite le concile est d’abord une attitude intérieure de louange, d’adoration, de communion à l’unique sacrifice du Christ qui s’exprime dans le langage corporel.
Que l’accueil de cette nouvelle traduction, en bousculant nos habitudes, nous permette de participer d’une manière plus pleine, consciente et active à la célébration de l’Eucharistie, devenant ainsi pleinement membres du corps du Christ.
Qu’en ce temps de l’Avent, à la prière de la Vierge Marie, Mère du Christ et de l’Eglise, nous grandissions dans la foi, l’espérance et la charité, pour faire advenir le règne de Dieu.
Amen, viens Seigneur Jésus !
Fiche n°4 : Tournés vers le Père
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1- Une prière adressée au Père
Dans la messe, les prières sont adressées au Père, par le Christ, dans l’Esprit Saint. C’est vers lui que s’orientent notre louange et nos supplications. Les incises « Dieu notre Père », « Père » ou « Père très Saint » sont ainsi rajoutées dans les différentes prières eucharistiques pour mieux rappeler que c’est à Lui que nous nous adressons et pour garder nos coeurs élevés et tournés vers Lui comme nous l’exprimons dans le dialogue introductif à la prière eucharistique.
Les paroles de l’institution de l’Eucharistie montrent particulièrement cette orientation vers le Père, Jésus reprenant les gestes et prières de la bénédiction traditionnelle du repas juif de la Pâque, directement adressée à Dieu. La nouvelle traduction permet de mieux saisir cet aspect : « il le bénit, le rompit » devient « il dit la bénédiction, il rompit le pain » ; « Il la bénit, et la donna à ses disciples » devient « il dit la bénédiction et donna la coupe à ses disciples ».
2- Un peuple qui reçoit tout de son Dieu et Père
Par la liturgie, l’homme fait un juste retour de gloire et d’amour au Père. La gloire rendue à Dieu par l’homme est indissociable du Salut donné à l’homme par Dieu. Nous retrouvons cette association au début de la 2ème prière eucharistique : « Vraiment, Père très Saint, il est juste et bon, pour ta gloire et notre salut, de t’offrir notre action de grâce. »
La prière de présentation des dons exprime désormais davantage les interactions entre Dieu et son peuple :
« Tu es béni, Seigneur, Dieu de l’univers : nous avons reçu de ta bonté le pain que nous te présentons, fruit de la terre et du travail des hommes ; il deviendra pour nous le pain de la vie. »
« Tu es béni, Seigneur, Dieu de l’univers : nous avons reçu de ta bonté le vin
que nous te présentons, fruit de la vigne et du travail des hommes ; il deviendra pour nous le vin du royaume éternel. »
Cette prière de bénédiction rappelle l’origine et la fin de notre offrande : nous présentons au Père ce qui vient de lui, participant ainsi au salut qu’il nous offre.
Ce salut se réalise ultimement par la découverte et la contemplation du visage du Père : « Souviens-toi dans ta miséricorde de tous les défunts. Accueille-les dans la lumière de ton visage. » (2ème Prière eucharistique) Comme le disait saint Irénée : « la gloire de Dieu, c’est l’homme vivant, la vie de l’homme c’est la vision de Dieu ».
3- Un peuple en communion
La prière sur les offrandes est profondément remaniée par fidélité au texte latin :
« Priez, frères et soeurs : que mon sacrifice, qui est aussi le vôtre, soit agréable à Dieu le Père tout-puissant.
R./ Que le Seigneur reçoive de vos mains ce sacrifice à la louange et à la gloire de son nom, pour notre bien et celui de toute l’Eglise. »
Cette nouvelle formulation met en évidence la complémentarité du sacerdoce baptismal et du sacerdoce ministériel au sein du peuple de Dieu. Si l’offrande est unique et commune, prêtres et baptisés s’offrant tout autant et participant aussi pleinement à l’offrande du Christ, elle est pourtant selon des modalités distinctes : le prêtre, en représentant mystérieusement le Christ (in persona Christi), permet et sert l’offrande de tous au Père. Ainsi, aucun des deux sacerdoces ne peut agir sans l’autre.
Nous préciserons désormais dans les prières eucharistiques que le pape avec lequel nous demandons à être en union est notre pape.
Enfin la diversité du peuple de Dieu est mieux mise en valeur par l’usage de l’expression « frères et soeurs » ou « serviteurs et servantes » dans le Je confesse à Dieu, la prière sur les offrandes ou la commémoration des défunts de la prière eucharistique. Il ne s’agit pas là d’une concession faite à l’air du temps mais de la reprise d’une formulation présente dans de nombreux missels plus anciens (fratres et sorores).
Fiche n°3 : Jésus, rédempteur
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A plusieurs reprises, l’appellation Jésus-Christ est remplacée par Jésus, le Christ, notamment dans le corps des prières eucharistiques, comme pour mettre en évidence la mission particulière de Jésus : le Christ, c’est-à-dire l’oint, le messie, l’envoyé, le promis, l’attendu, le Verbe incarné, qui réconcilie en lui l’humanité avec Dieu.
- 1- Le péché ou les péchés ?
La messe s’ouvre par une démarche pénitentielle. L’invitation est légèrement modifiée. Nous ne sommes plus invités à reconnaître « que nous sommes pécheurs » mais « que nous avons péché ». De même « le péché du monde » au singulier devient « les péchés du monde » au pluriel conformément au texte latin dans l’expression « Agneau de Dieu, qui enlèves les péchés du monde » que nous retrouvons dans l’hymne du Gloire à Dieu, dans l’invocation de l’Agneau de Dieu et dans la préparation immédiate à la communion.
En effet, ce n’est pas un péché générique et impersonnel que je reconnais devant Dieu. Ce sont chacun des péchés que j’ai commis et pour lesquels je suis responsable. Jésus ne vient pas me relever du péché en général, de manière abstraite. Il vient prendre sur Lui dans sa Passion, chacun de mes péchés.
« C’étaient nos souffrances qu’il portait, nos douleurs dont il était chargé. […] C’est à cause de nos révoltes qu’il a été transpercé, à cause de nos fautes qu’il a été broyé. Le châtiment qui nous donne la paix a pesé sur lui : par ses blessures, nous sommes guéris. » (Is 53, 4-5)
- 2- La messe : mémorial du sacrifice du Christ
C’est bien cet unique sacrifice du Christ qui est rendu présent pour nous à chaque eucharistie et que la nouvelle traduction met mieux en évidence.
– Nous répondrons à la prière sur les offrandes : « Que le Seigneur reçoive de vos mains ce sacrifice à la louange et à la gloire de son nom, pour notre bien et celui de toute l’Eglise. »
– Dans le canon romain « ces offrandes saintes » deviennent « ces dons, ces offrandes, sacrifice pur et saint ».
– Dans la 3ème prière eucharistique : « Nous t’offrons Seigneur, en action de grâce ce sacrifice vivant et saint. Regarde nous t‘en prions l’oblation de ton Eglise et daigne y reconnaître ton Fils qui, selon ta volonté, s’est offert en sacrifice pour nous réconcilier avec toi. »
– Dans la 4ème prière eucharistique : « Regarde, Seigneur, Celui qui s’offre dans le sacrifice que toi-même as préparé pour ton Eglise. »
- 3- L’anamnèse
L’anamnèse est cette acclamation chantée par tous juste après la consécration qui rappelle la rédemption accomplie par le Christ et célébrée en mémorial. Elle se décline en trois variantes. Les deux premières variantes sont modifiées pour être plus fidèles au texte latin d’origine.
I : Il est grand le mystère de la foi :
Nous annonçons ta mort, Seigneur Jésus, nous proclamons ta résurrection, nous attendons ta venue dans la gloire.
II : Acclamons le mystère de la foi :
Quand nous mangeons ce pain et buvons à cette coupe nous annonçons ta mort, Seigneur ressuscité, et nous attendons que tu viennes.
La dernière formule utilisée actuellement (Gloire à toi qui étais mort…) n’est pas présente dans l’édition typique en latin mais pourra être maintenue pour les pays francophones.
Nous voyons en outre apparaître une nouvelle formule d’anamnèse qui n’avait pas été traduite en français dans les éditions précédentes et qui nous rappelle que, vraiment, Jésus est sauveur du monde.
Qu’il soit loué, le mystère de la foi :
Sauveur du monde, sauve-nous !
Par ta croix et ta résurrection, tu nous as libérés.
Fiche n°2 : consubstantiel – Quesaco ?
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Un des enjeux majeurs de la nouvelle traduction est la fidélité au contenu de la foi selon l’adage : lex orandi, lex credendi (ce qui est prié, c’est ce qui est cru). C’est dans cette optique qu’apparaît un changement de traduction dans la prière du Credo de Nicée Constantinople. Nous ne dirons plus du Fils qu’il est de même nature que le Père, nous dirons qu’il est consubstantiel au Père.
- Que signifie consubstantiel ?
Le terme consubstantiel, qui peut nous sembler bien abstrait et peu utilisé dans nos conversations courantes, a été ciselé spécifiquement pour dire la foi des chrétiens. Il nous vient directement du concile de Nicée en 325 qui a précisé la relation du Père et du Fils en nous disant qu’ils sont « de même substance » : homousios en grec, consubstantialis en latin.
De nos jours, le mot substance est utilisé pour désigner une matérialité. Ce n’est pas le sens d’origine de ce mot qui désigne en philosophie l’essence, la réalité existentielle, l’être même de la chose ou la personne considérée. Par conséquent, deux éléments consubstantiels partagent la même essence et sont inséparables, indivisibles.
- Qu’apporte ce mot à notre foi ?
La traduction « de même nature » utilisée jusqu’à présent, sans être fausse, est incomplète. Jacques Maritain, avec d’autres, en avait dès 1970 souligné l’insuffisance. Il expliquait avec humour : « Je suis de même nature que M. Pompidou, je ne lui suis pas consubstantiel. »
Le risque avec l’expression de même nature est de faire de Jésus un Dieu à côté du Père ou subordonné au Père. C’était l’hérésie arienne des premiers siècles chrétiens.
Or nous croyons en un Dieu unique. Le Père et le Fils sont un seul et même Dieu qui partagent bien sûr la même nature divine mais encore le même être divin, la même volonté divine, de toute éternité et de manière indivisible.
Cette foi, si elle a été transcrite en langage théologique à travers ce mot consubstantiel par les pères de l’Eglise, nous vient de Jésus lui-même :
– « Le Père et Moi nous sommes UN. » (Jn 10, 30)
– « Celui qui m’a vu a vu le Père. […] Croyez-moi : je suis dans le Père, et le Père est en moi. » (Jn 14, 9-11)
Le prologue de Saint Jean ou la prière sacerdotale de Jésus en Jean 17 expriment aussi cette pleine communion entre le Père et le Fils.
- Le Mystère de la Trinité
Ce seul mot, consubstantiel, vient donc préciser la relation entre le Père et le Fils au sein de la Trinité.
A la fin de la messe, le prêtre bénit le peuple en disant :
Que Dieu tout-puissant vous bénisse,
Le Père, et le Fils, et le Saint Esprit.
La conjonction et est rajoutée, conformément au texte latin.
A travers ces deux changements sont bien tenus ensemble l’unicité de Dieu et la diversité des trois personnes divines en Dieu, chacune recevant même adoration et même gloire. C’est ce que la foi chrétienne nomme la Trinité.
Au-delà des mots qui peuvent nous sembler compliqués, ouvrons nos cœurs à la contemplation de cet échange d’amour entre les personnes divines, le Père, le Fils et le Saint Esprit, amour trinitaire qui est source de toutes grâces pour notre humanité. Laissons notre intelligence humaine s’agenouiller devant le mystère de Dieu.
Fiche n°1 : Pourquoi une nouvelle traduction[1] ?
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A compter du premier dimanche de l’avent 2021, une nouvelle traduction en langue française du Missel romain entrera en vigueur dans tous les pays francophones.
- Qu’est-ce que le Missel ?
Le Missel romain est l’un des livres liturgiques nécessaires à la célébration de la messe. Le Lectionnaire contient les lectures, il est décliné en trois tomes : Lectionnaire de semaine, Lectionnaire du dimanche et Lectionnaire des saints et messes rituelles. Le Missel romain, quant à lui, contient les rites et prières et est destiné à toutes les communautés catholiques de rite occidental. Le livre de référence est le « Missale Romanum » en latin. Les conférences épiscopales en assurent la traduction et les adaptations nécessaires en dialogue avec la Congrégation pour le Culte Divin.
Nous utilisons actuellement la 3ème édition de ce Missel qui date de 2002 (1ère édition 1970, 2ème édition 1975). Comme nous le rappelle Paul VI, le Missel est appelé à être « un signe et un instrument d’unité : dans la diversité des langues, une même prière montera ainsi vers le Père par notre Grand Prêtre Jésus Christ dans l’Esprit Saint.[2] »
Le Missel est ainsi au service de la célébration comme la partition au service du concert. Il garantit l’unité de la foi exprimée dans la prière liturgique selon la diversité des peuples, des langues et des cultures.
- Pourquoi une nouvelle traduction ?
La première traduction en langue française du Missel de 1970 était entrée en vigueur pour le monde francophone en 1974. Cette première traduction avait été réalisée rapidement à la suite du renouveau de la liturgie consécutive au concile Vatican II. En effet, les premières équipes de traducteurs avaient dû, dans un délai assez bref, fournir un travail colossal. Ces traducteurs avaient choisi un style direct et clair.
En 2001, le pape saint Jean Paul II promulgue un nouveau guide officiel des traductions liturgiques, l’instruction Liturgiam authenticam, qui pose le principe d’une équivalence formelle et demande une plus grande proximité des traductions avec le texte latin d’origine.
Il faut voir dans cette requête le souci de l’unité de l’Eglise exprimé plus haut. Si on laisse chaque traduction s’éloigner du texte original, des écarts d’interprétation peuvent apparaître entre les différentes traductions pouvant aller jusqu’à la déformation du contenu de la foi tel qu’il a été progressivement formulé dans la tradition de l’Eglise.
La traduction du Missel fait suite à la traduction liturgique de la Bible publiée en 2013. C’est un travail de précision tout en nuances qui a veillé à produire une traduction fidèle au texte latin original, adaptée à la proclamation publique en tenant compte des spécificités des différents pays francophones et apte à être cantillée.
Notons enfin que le nouveau Missel Romain en langue française contient aussi les célébrations des nouveaux saints qui ont été introduits dans le Calendrier liturgique universel depuis une trentaine d’années.
- Quels changements ?
La majorité des changements concerne les prières dites par le prêtre seul. Quelques changements concernent l’assemblée. Ils seront détaillés dans les prochaines fiches.
Comme nous avons su le faire pour la nouvelle traduction du Notre Père, accueillons avec bienveillance ces quelques modifications. Elles viendront certes perturber nos habitudes, mais saisissons cette occasion pour porter une attention nouvelle sur certaines formules que nous disons peut-être machinalement et participer ainsi de manière plus intense à la prière liturgique de l’Eglise.
[1] Sources : Découvrir la nouvelle traduction du Missel Romain (Mame) et Présentation du nouveau Missel Romain en langue française (Artège)
[2] Constitution apostolique « Missale Romanum » (1969)